Pays : USA
Durée : 2h02
Genre : Science-fiction / Horreur
Sortie : 10 mai 2017
Réalisateur : Ridley Scott
Distribution : Michael Fassbender, Katherine Waterston, Billy Crudup, Danny McBride, Demian Bichir,…
Histoire : Les membres d’équipage du vaisseau Covenant, à destination d’une planète située au fin fond de notre galaxie, découvrent ce qu’ils pensent être un paradis encore intouché. Il s’agit en fait d’un monde sombre et dangereux, cachant une menace terrible. Ils vont tout tenter pour s’échapper
Scénario : C’est bien ici que le débat sur Alien covenant sera le plus houleux et risque fort de faire naître la polémique. Ridley Scott et ses scénaristes se sont lancés dans un défi titanesque en proposant tout à la fois une suite à Prometheus, décrié par beaucoup de fans de la première heure de la saga Alien, et une sorte de remake-séquelle du film originel. Il est nécessaire par contre d’avoir bien en mémoire les évènements qui se sont déroulés dans Prometheus sous peine d’être quelque peu largué. Et, ce même si le récit se montre souvent très pédagogue pour rappeler pas toujours très subtilement ce qui est arrivé aux protagonistes du film précédent (cf, le sort réservé au Dr Shaw interprété par Noomi Rapace).
En tant que suite de Prometheus, Alien covenant fonctionne plutôt efficacement et continue à forger une mythologie suffisamment intrigante pour laisser à son créateur le bénéfice du doute (Ridley Scott ayant déjà annoncé que plusieurs suites étaient envisagées). Le souci vient plutôt du titre du film qui, cette fois-ci, lie directement le spectateur avec ses souvenirs d’Alien, le huitième passager. A ce titre, il faudra être bien patient avec un récit qui met un temps fou à recoller les wagons. Le Alien movie que le titre, l’affiche, la bande-annonce et l’intrigue laissaient espérer se cache aussi bien que la créature et prend vraiment tout son sens dans la dernière demi-heure.
On peut y voir aussi le désir de Ridley Scott de ne pas se répéter et se contenter d’une version 2.0 de son chef d’œuvre. A l’image de son double héros déroutant (les droïdes David et Walter campé par Michael Fassbender), le propos du cinéaste sur la création et la toute-puissance qu’elle engendre, offre des grilles de lecture d’une évidente richesse et entraîne le film, notamment au milieu de l’intrigue lorsque David tente de « corrompre » Walter, vers des horizons potentiellement exaltants.
Seulement, le dosage est extrêmement difficile à concilier avec le reste de l’histoire qui tend bien plus vers un univers de série B horrifique. Une sorte de Vendredi 13 méchant et gore où Jason aurait été remplacé par une sanguinaire créature. Et c’est d’autant plus laborieux à mettre en place qu’à l’instar des héros pas très fufutes de Prometheus, les membres de l’équipage du Covenant multiplient les réactions et décisions les plus sottes possibles. En termes de crédibilité, la partie survival d’Alien covenant a sacrément du plomb dans l’aile.
Réalisation : Dans l’espace, Ridley Scott se sent bien. On retrouve ici toutes les qualités esthétiques qui avaient fait la force essentielle de Prometheus. La direction artistique est toujours aussi magnifique et Alien covenant parvient avec brio à nous plonger dans son univers visuel d’une grande richesse.
Si, en matière d’effroi, le cinéaste ne parvient jamais à faire naître une tension aussi mémorable qu’à l’époque d’Alien, il s’offre quelques moments puissants où le goût pour la violence et le gore dénotent pour une production destinée à un public large. De toute évidence, le cinéaste s’amuse avec les clichés qu’il a lui-même créés pour certains, au risque parfois de tomber dans une facilité préjudiciable pour ne pas dire déconcertante (le combat à mains nus, la séquence de la douche,…). Si la première partie est extrêmement maîtrisée, il n’en va pas de même lorsque l’action s’emballe et surtout lorsqu’elle s’aventure dans le très spectaculaire (l’affrontement sur le toit du vaisseau). La cohérence visuelle en prend pour son grade au point d’avoir la désagréable impression d’être face à une œuvre protéiforme. S’il y a une certaine logique à cela eu égard au sujet même du film, l’adhésion s’avère nettement plus compliquée.
Un sentiment qui se vérifie aussi dans l’utilisation des effets spéciaux. D’une réussite technique exemplaire, l’alternance entre effets old school et utilisation moderne empêche la cohérence et déroute plus d’une fois.
Interprétation : Beaucoup auraient certainement aimé que l’élément le plus mémorable d’Alien covenant soit justement la créature du titre. Malgré quelques moments mémorables (pour la plupart déjà vus dans les différentes bandes annonces), il n’en est rien. Ridley Scott nous l’annonce d’ailleurs tout de suite avec sa séquence introductive entre Guy Pearce et Michael Fassbender. Le cœur du récit, celui qui passionne vraiment Scott, tourne autour de la création, ce désir de jouer à Dieu. En démiurge retors (version David), Fassbender réussit sans mal à être plus terrifiant que tous les aliens peuplant la planète inconnue. En Walter, androïde se découvrant une conscience et des émotions (on n’est pas loin ici de l’autre film phare de Scott, Blade Runner), le comédien se montre tout aussi convaincant. Si la partie, longue, concernant cette lutte d’influences, peut laisser perplexe, cela ne provient jamais de la double et subtile interprétation de l’acteur. On ne sera pas aussi enthousiaste pour le reste de l’équipage du Covenant. Globalement traités par-dessus la jambe quand ils ne servent pas uniquement à être de la chair à canon pour les aliens, les scientifiques ne laissent aucune trace mémorable. A commencer par le personnage de Daniels, censé être une sorte de nouvelle Ripley (ou du moins forcement perçue comme ça par les spectateurs). Katherine Waterston enfile un rôle trop grand pour elle. Sans déméritée, elle ne parvient jamais à trouver le bon équilibre. A l’image de l’ultime affrontement dans les coursives du vaisseau bien loin du rapport sensitif que l’on avait avec Ripley en 1979.
En bref : Ambitieux, Alien covenant l’est assurément. Concluant, c’est une toute autre histoire. Au point de laisser dubitatif les fans de la première heure tout comme les admirateurs de Prometheus.
Publié le 15/05/2017 par Laurent Pécha