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Detroit : Indispensable Bigelow

Après Démineurs et Zéro dark thirty, Kathryn Bigelow signe un nouveau film coup de poing. L'incontournable de cette fin d'année 2017.

detroit affiche du film de kathryn bigelowPays : USA

Durée : 2h23

Genre : Drame

Sortie : 11 octobre 2017

Réalisateur : Kathryn Bigelow

Distribution : Algee Smith, John Boyega, Will Poulter, Hannah Murray, Jason Mitchell, Anthony Mackie, Ben O’Toole, Jack Reynor

Histoire : Durant l'été 1967, Detroit connaît une émeute sans précédent. Entre la population afro-américaine et la police, l’affrontement est inévitable. Au cœur de la ville, le motal Algiers va être le lieu d'un terrible et sanglant interrogatoire mené par des forces de l'ordre bien décidées à retrouver l'auteur des coups de feu censés avoir été dirigés contre elles.   

 

 

Depuis son retentissant Oscar de la meilleure réalisatrice (accompagné de celui du meilleur film) pour Démineurs en 2010 , Kathryn Bigelow a changé de statut et son cinéma aussi. Éminemment plus politique qu’il l’était au millénaire dernier, ce dernier ne cesse désormais de questionner frontalement les actes de son pays. Après deux films saisissants qui l’avaient amené à diriger ses récits vers l’extérieur, de l’autre côté de l’Atlantique, la cinéaste a décidé de revenir chez elle pour traiter d’un sujet qui ronge l’Amérique depuis des siècles et des siècles : le racisme. En choisissant d’évoquer les émeutes de 1967 à Détroit, Bigelow prenait le risque de rendre une copie quelque peu datée, une sorte de beau livre d’images historiques. C’est mal connaître la dame ! Par le prisme de sa caméra et d’un scénario puissant de Mark Boal, Detroit est une œuvre à la portée universelle choquante, un film de cinéma essentiel. Sans aucun doute l’un des meilleurs de 2017. Explications !   

detroit la critique

Sorte de mini-série condensée en 2h23, Detroit demande beaucoup à ses spectateurs. A commencer par un flot d’informations et de personnages que le récit nous livre en une riche première demi-heure. De celle qui permet à la fois de placer le contexte brûlant de l’époque (en 1967, l’opposition entre noirs et blancs au cœur de la ville de Détroit a atteint son paroxysme) tout en mettant en avant sans pour autant les placer délibérément au cœur de l’intrigue les principaux protagonistes qui seront au cœur de la tragédie à venir. A ce titre, les intentions de Bigelow et Boal prendront de plus en plus de sens au fil de l’intrigue pour devenir d’une confondante évidence dans les derniers instants donnant furieusement envie de revoir plus tard le film pour en appréhender toute la pleine puissance.

detroit la critique

Ultra documenté laissant apparaître à chaque instant le background journalistique de son scénariste, saisi sur le vif par une caméra tout entière dévouée au style documentaire au point de poser les bases d’un nouveau néoréalisme, Detroit nous plonge littéralement au cœur d’une ville déchirée par la violence et ce racisme qui n’a plus rien de latent. Bien aidée par une direction artistique qui est parvenue à récréer l’époque avec une évidence confondante, Kathryn Bigelow ne lâche jamais son objectif premier : nous faire ressentir au plus profond de notre être ce que c’est d’être du mauvais côté. En l’occurrence à Détroit en 1967, avoir le « malheur » d’être noir face à une police blanche.

detroit - un film de kathryn bigelow

S’appuyant sur les fantômes du sensationnel Aux frontières de l’aube, la réalisatrice transforme petit à petit son film « historique » en authentique film d’horreur. Pivot à l’intensité presque insoutenable, la séquence en huis-clos du motel Algiers fait ainsi office de révélateur absolu de ce que l’âme humaine peut avoir de mauvais. Parvenant presque à détruire la barrière de l’écran, Bigelow crée un insupportable malaise faisant ressentir la peur et la souffrance de ses protagonistes livrés à une police prête à tout pour obtenir gain de cause. A ce titre, le contraste entre la normalité extérieure du policier interprété magistralement par Will Poulter et ses actes font littéralement froid dans le dos.

detroit - will poulter

Si le troisième acte, celui qui permet de juger les terriblement événements passés, paraît forcément moins anxiogène au risque de faire perdre de sa superbe à un récit si tendu jusqu’ici, il n’en demeure pas moins capital. Et la cinéaste de l’aborder avec une simplicité déconcertante. Évitant les interminables séquences de procès à rallonge, elle se focalise sur les hommes et fait rejaillir l’émotion notamment au cours d’une séquence finale magnifique qu’on emporte avec nous, avec ce frêle espoir que la vie trouve toujours un moyen de survivre aux pires démons. Grandiose !

Publié le 12/10/2017 par Laurent Pécha

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